Errances

9 décembre 2015

La procuration de vote ça se mérite

Filed under: corridors — Étiquettes : , — errant @ 18:02

– Dépêche toi, la secrétaire du commissariat est aimable comme une porte de prison, si tu arrives après 17h elle va paniquer.

Je fais mon sac rose bonbon je mets mon gros manteau gris et mes gants moches, j’enfourche mon vélo et je file. C’est très bien deux roues, je suis beaucoup plus fine que n’importe quel engin sur ce boulevard, je vire, je tourne, je prend le mauvais côté de la route, je slalome entre les voitures, je loupe la piste cyclable. J’avale une mouche, d’un air coupable je me demande si je viens de pécher pour un végan, je souris toute seule.

 – Tu vois le boulevard, c’est tout droit. Tu vois le feu au loin, tu le passes, il y en aura un deuxième. Un peu plus loin il y a une église bizarre, ne vas pas jusque là, le commissariat est à ta gauche. Oui ta gauche, côté cœur, là.

Je roule. Tout droit. C’est un putain de faux plat. Je trouve le commissariat, c’est un gros cube en béton. Dans la nuit tombante c’est un gros cube en béton très glauque. Je pense que c’est fermé, deux personnes arrivent en même temps que moi, c’est ouvert.

La secrétaire est déprimée de voir autant de monde arriver en même temps. Elle écrase la cigarette qu’elle vient d’allumer avec la pulpe de ses doigts. Aie.

Je peine à accrocher mon vélo à un arbre, personne ne doit venir en vélo jusqu’ici. Il y a apparemment une incohérence dans ma demande. On tartine un peu de blanc.

– Au revoir, bonne soirée.

Je reprends ma route, me perd un peu, prend un boulevard en pente montante, merde. J’accélère, ça ne fait pas de mal un peu de sport. De toute façon il fait froid. L’air est glacé. Ça sent le froid. Enfaite c’est peut être l’odeur des vaisseaux de mon nez qui se glacent. Ou l’odeur de ma morve qui se glace ? J’en ai marre du boulevard, je prends la première à gauche. Je suis dans une rue très calme, personne, seulement des immenses demeurent. Elles s’éclairent de l’intérieur et les vitraux font danser une lumière très douce. Très douce. Sacré temps, 1900. Je roule au milieu de la route. J’espère qu’il n’y a pas une voiture électrique. J’arrive sur un nouveau boulevard. Embouteillage de fin de journée. Je suis la reine du pétrole, je vais plus vite que tout le monde. Si ça bloque sur la route, je prends le trottoir. Je passe le long des chantiers. J’aime bien quand rien n’est fini, c’est comme une anti-dissection. J’arrive chez moi, il fait chaud. La lumière est douce. Douce. Douce. Je vais profiter des quelques minutes que j’ai pour écrire, avant que la vie de famille ne reprenne.

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